Interview Thomas Phibel

Qu’est-ce qui t’a poussé à devenir footballeur?

Je viens de la Guadeloupe, c’est une île proche du Brésil. Comme dans toutes les Caraïbes, ils adorent le foot. Dans ma famille tout le monde aime le foot. Mon père est supporter de l’OM et on regardait beaucoup les matchs. A priori c’est plutôt mon père qui m’a fait aimer le foot… 

Du coup, tu supportes l’OM aussi? 

Non, plutôt le PSG. 

Quel joueur admirais-tu petit?

Ronaldinho, j’aimais vraiment ce joueur. Pour moi c’est un magicien, un artiste. C’est un joueur que j’ai eu la chance de voir jouer lorsque j’étais ramasseur de balles à l’académie de Lens. 

Parle-nous de tes débuts et comment s’est passée ton arrivée en France?

En Guadeloupe, j’étais en centre de formation à la MJC des Abymes, c’est là que j’ai commencé. Puis j’ai eu la chance de participer à une détection dans le Nord-Pas-de-Calais et J’ai été retenu par le RC Lens. J’avais 15 ans, je me suis lancé tout seul en Europe pour essayer de percer. L’adaptation était un peu difficile les premiers mois. Il faisait hyper froid et il fallait aussi faire attention avec les études. Mais j’ai eu la chance d’atterrir dans une excellente structure. Pour décompresser, je partais pendant les vacances voir ma famille. C’est difficile d’être loin de ses parents. Mais quand on essaie d’aller chercher son rêve il faut faire des sacrifices, ce que j’ai fait.

Après Lens et la Belgique, tu as connu les pays de l’Est (Pologne, Russie, Serbie, Arménie). Quelle expérience tu ressors de ce parcours?

En Belgique, j’ai de très bons souvenirs. J’ai eu la chance de rencontrer pas mal de camarades qui sont à ce jour dans de grands clubs. On avait une belle équipe, beaucoup de joueurs talentueux et un excellent coach, Michel Preud’homme. L’année où je suis arrivé, on a fini champions. Puis les Pays de l’Est ça a été le choix d’une nouvelle expérience. Il y a la langue et il fait encore plus froid. C’était un nouveau challenge, j’ai beaucoup appris et j’ai construit mon avenir là-bas que ce soit physiquement ou financièrement. Ça m’a permis de voyager pour jouer des compétitions comme l’Europa League et la qualification pour la Ligue des Champions et d’affronter de nombreux joueurs de qualité. 

Quel est le meilleur joueur contre qui tu as joué?

Le meilleur joueur contre qui j’ai joué a été Hulk. Techniquement il est très fort, il va vite mais ce qui est plus impressionnant c’est sa frappe de balle, j’ai rarement vu ça. Quand il y a un coup franc tu as peur d’aller dans le mur. Il est tout petit et difficile à tenir avec sa vitesse, c’était incroyable de jouer contre lui.

Tu es au Meyrin FC depuis janvier 2020, comment ça se passe?

Je suis hyper content d’être au Meyrin FC. J’ai discuté avec le coach Jean-Philippe Lebeau et les autres membres de la structure. Le projet sportif du club et le discours du coach m’ont plu. J’ai vu que je pouvais amener mon expérience pour aider le groupe et motiver les jeunes. C’est un rôle important à mon âge pour partager ma motivation. Je suis très satisfait du groupe aussi. On a beaucoup de joueurs qui ont bien progressé depuis la saison passée et un effectif qui s’est bien consolidé. La concurrence est saine et je pense qu’à l’avenir on sera encore plus fort. Et j’apprécie vraiment le travail du coach qui est toujours là pour nous motiver. 

Quels sont tes objectifs?

Je le dis, je ne suis pas venu ici pour rigoler. Je suis venu ici pour gagner et être champion. Ma femme est de cette ville, ma fille est née ici. J’avais la possibilité de continuer loin de ma famille, ce n’est pas un sacrifice que j’ai fait parce que je suis entièrement heureux d’être venu ici et de poursuivre un nouveau challenge. Mon objectif premier est de gagner tous les matchs et d’être champion. Tous les jours je viens à l’entraînement, je viens aux matchs, je ne veux que ça. Si je perds ou même si je ne joue pas, je serai toujours motivé à faire mieux au prochain match et toujours là pour encourager mes camarades. C’est l’esprit qu’il faut avoir, seul et en groupe. Et je ferai mon maximum pour aider le Meyrin FC à atteindre son objectif.

Quelles sont les qualités requises pour devenir un bon footballeur?

Pour réussir dans le foot, il ne faut pas considérer les choses comme acquises. Quand tu gagnes un match, il ne faut pas se reposer sur la victoire car il y aura un autre match le week-end suivant. C’est la constance qui t’amène au haut niveau, il ne faut jamais arrêter de bosser et penser à s’améliorer toujours plus. 

Quelles sont pour toi les forces et faiblesses de l’équipe?

On se crée beaucoup d’occasions. Et on est dangereux sur les coups de pied arrêtés. On sait construire le jeu mais aussi profiter des espaces pour aller vite vers l’avant  En revanche, on doit s’améliorer dans la gestion des émotions. On doit savoir garder la tête froide pour ne pas recevoir des cartons bêtes, qui nous pénalisent au final. Ce sont de petits détails qui comptent tout au long d’une saison.

Avec ton parcours, quelle anecdote / moment fort t’a marqué?

Le derby contre le Partizan de Belgrade. Je prenais ça un peu à la rigolade. J’avais vu et vécu des derbys pendant ma carrière mais là-bas c’était fou. A l’arrivée au stade du Partizan, les policiers mettent leurs boucliers au-dessus de nos têtes. Tu comprends pourquoi quand tu commences à entendre les cailloux tomber. C’est assez spécial. On joue devant soixante mille personnes et ça vous insulte de tous les côtés. Là-bas les feux d’artifice sont autorisés. C’est assez fou. Pendant la théorie, les supporters savent où sont les vestiaires adverses et lancent des pierres pour perturber la causerie. Quand vous jouez en Serbie il y a certains endroits où vous pouvez aller manger et d’autres non, car vous n’êtes pas les bienvenus. Bon, je ne peux pas critiquer les Partisans de Belgrade car c’est pareil chez nous. Il y a un long tunnel au Maracana pour entrer sur le terrain et au-dessus, tous les supporters qui tapent dedans et ça crie, tu entends dedans. C’est également difficile de jouer là-bas. Un derby se transforme en quelque chose de plus important qu’un match, c’est dangereux. Avant le match, notre bus était escorté comme si on était des célébrités. Après, les supporters sont vraiment incroyables là-bas. J’ai déjà fait des stades à quinze-vingt mille places, mais en Serbie c’est un autre niveau.